Henri Cartier-Bresson, mise en pratique (2)

Dans quelle mesure Henri Cartier-Bresson a-t-il été influencé par le mouvement surréaliste pour élaborer le concept de «l’instant décisif» ? Telle est la question que l’un de mes étudiants m’avait posé quelques jours avant une journée consacrée à la prise de photos sur le terrain dans le cadre du cours «Sociologie Visuelle» que j’enseignais à l’Université Laval. Il est tout à fait plausible d’avancer l’idée qu’Henri Cartier-Bresson a été fortement influencé par le mouvement surréaliste dans l’élaboration de son concept de «l’instant décisif». Pourquoi ? Parce que le surréalisme mettait l’accent sur l’importance de saisir les moments imprévus et surprenants de la vie quotidienne, idée reprise par Cartier-Bresson dans sa propre approche photographique. Également inspiré par les idées surréalistes sur la correspondance entre les choses et les événements, Cartier-Bresson a ainsi aligné sa recherche de relations visuelles et significatives dans ses propositions visuelles.

Cette volonté de Cartier-Bresson à mettre en valeur l’importance de capturer des moments uniques et significatifs n’est pas anodine en ce qui concerne la pratique de la sociologie visuelle, car l’instant décisif peut effectivement mener à montrer des situations sociales contrastées. Par exemple, la photo de gauche, représentant un homme qui quémande un repas, tout comme la vidéo ci-dessous, sont significatives en ce sens [lire la suite].

Fin de vie

Dans la présente démarche photographique, il est tout d’abord question de rendre compte de la représentation qu’ont bien voulu leur donner les artistes qui ont contribué à cette performance, c’est-à-dire celle de la capacité de se déplacer par soi-même et comment cette capacité évolue à travers le temps.

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La création artistique autour de la mort est immense, sans limite dans toutes les cultures et religions : tombes, mausolées, sculptures, peintures, monuments funéraires, performances artistiques, petits objets de toutes sortes qui s’y rapportent et aussi de mémoire et qui, à leur tour, symbolisent la brièveté de la vie, le passage du temps. Malgré cela, il ne s’agit pas d’espaces architecturaux et d’œuvres d’art que le public évite ; au contraire, ils sont bel et bien visités.

Tenue à Québec en 2017, la performance artistique Où tu vas quand tu dors en marchant ? abordait, entre autres, le thème du passage vers la mort. En fait, depuis des siècles, la mort et l’art sont liés, ce dernier servant de représentation qui exprime, entre autres, le passage à travers les différentes étapes de la vie qui se solde inéluctablement par la mort. Il en résulte un univers de manifestations que l’on pourrait bien appeler l’art de la mort. Toutefois, la personne en deuil est rarement le protagoniste de la représentation de la fin de vie, et la prestation offerte par Où tu vas quand tu dors en marchant ? n’échappe pas à ce genre de consensus non dit.

De même que les peintures prennent leur sens dans un monde de peintres, de collectionneurs, de critiques et de conservateurs, les photographies prennent leur sens de la manière dont les personnes qui les utilisent les comprennent, les utilisent et leur attribuent ainsi un sens. Pour le sociologue, les photographies ont une signification particulière qui renvoie forcément à ce qui fait société, ce qui rassemble, ce qui définit des champs particuliers de comportements.

© Texte : Pierre Fraser (PhD), 2018
© Photos : Pierre Fraser (PhD), 2017

quand la mobilité se réduit…

quand la fin approche…

quand la fin est honorée…

quand la fin est chantée…

L’insolite en contexte

Des pigeons et une soupe Campbell

© Pierre Fraser, 2018
L’insolite en contexte survient du moment où un ensemble de repères visuels déstabilisent l’environnement visuel immédiat.

L’art urbain a cette capacité, par ses installations et ses performances, de déconstruire ou reconstruite ce qui constitue nos repères visuels au quotidien.

Cette œuvre artistique avait été installée en 2018 au parc de la Pointe-aux-Lièvres (Québec) dans une ancienne zone industrielle requalifiée en quartier d’habitations. Avec ses pigeons surdimensionnés (2 mètres), cet oiseau urbain typique et souvent considéré comme nuisible, et sa boîte de soupe Campbell, symbole emblématique du pop art des années 1960 mené par Andy Warhol, renvoie à une certaine occupation du territoire géographique (pigeons) et à une certaine occupation de l’imaginaire collectif (boîte de soupe Campbell).

© Pierre Fraser (PhD), sociologue / texte et image